Rencontres des cépages modestes

INTRODUCTION


ET PRÉSENTATION DES PREMIERES « RENCONTRES »

Par Philippe Meyer,
président fondateur,
novembre 2011

 

Les Rencontres que nous inaugurons aujourd’hui sont nées au hasard d’une conversation amicale dans un vignoble bourguignon qui n’a de modestie que celle des cisterciens qui en plantèrent le cépage, j’ai nommé le clos de Vougeot. La chaleur de l’accueil de la confrérie de ce joyau de la côte de Nuits, la bonne chère et le vin aidant, il advint que les parrains et les fondateurs de nos Rencontres rivalisèrent de considérations sur le parti que les vignerons savent tirer de leur terroir et de leurs cépages et sur les émerveillants progrès du vignoble dans des régions dont plus personne n’attendait quelque chose. Et chacun de citer des cas désespérés dont l’amour de la vigne joint au savoir-faire, à la patience et à l’opiniâtreté avaient su tirer les vins les plus agréables, les plus étonnants, les plus délectables. L’idée de leur rendre hommage et, pour certains d’entre eux, de les faire mieux connaître, fut très logiquement lancée en l’air. Elle mit deux ans à retomber, et c’est cette retombée qui nous rassemble à Espalion et à Saint-Côme-d’Olt, en étroites et amicales harmonie et collaboration avec l’Association pour la Renaissance du Vieux-Palais d’Espalion qui s’est donné pour but, après avoir restauré ce bâtiment symbolique de la haute vallée du Lot, de faire connaître le Haut Rouergue, d’y attirer des personnes capables de l’apprécier, d’y organiser des manifestations de toutes natures susceptibles d’apporter à ses habitants des agréments de toutes sortes et de participer à tout ce qui peut dynamiser l’Aveyron. Notre idée est de réunir autour de ces cépages tous ceux qui portent intérêt au vin, qu’ils soient professionnels, depuis le vigneron jusqu’au sommelier, amateurs, chercheurs ou universitaires, voire simples curieux. Pour agrémenter ces Rencontres, nous les trufferons d’un spectacle, d’un récital, d’une lecture, bref d’un moment qui fera écho à ce que le vin et la vigne ont inspiré à l’un ou l’autre des arts, mineurs, majeurs ou émancipés. Les actes de ces journées seront publiés dans les mois à venir et nous réfléchirons ensemble aux thèmes que pourront aborder les tables rondes de l’année suivante. Nos premières Rencontres sont une ébauche ou un brouillon, mais il nous a paru nécessaire de passer à la réalisation de notre projet sans attendre d’avoir les moyens de lui donner toute la dimension et l’ampleur que nous croyons qu’il mérite. Bien sûr, il nous faudra pour cela des moyens financiers moins modestes que ceux qui nous ont permis cette préfiguration, et nous les chercherons auprès des pouvoirs publics comme des entreprises privées. Nous les trouverons d’autant mieux que nous pourrons leur dire non pas : « Voilà ce que nous allons faire», mais : «Voilà ce que nous avons déjà fait», et qui est la garantie de notre engagement, de notre enthousiasme et de notre capacité. Soixante-dix personnes se sont inscrites pour ces rencontres. Elles ont été rejointes par plus d’une quarantaine d’autres, signe d’un intérêt que le bouche à oreille a relayé. Il est vrai que l’Aveyron, c’est loin. Il est tout aussi vrai qu’une fois qu’on y est, on se demande pourquoi on n’y est pas plus souvent et plus longtemps. Il est facile de dire que c’est un très beau pays, car la France est tissée d’endroits magnifiques. Simplement, tous ceux qui découvrent l’Aveyron sont surpris de voir, non pas à quel point c’est une belle région, mais à quel point c’est un pays de beautés proches et variées. Quand vous descendez de Laguiole et de la montagne bossuée de l’Aubrac si comparable à un océan terrestre et que vous arrivez dans la vallée du Lot, vingt kilomètres plus loin et 700 mètres plus bas, vous changez d’univers ; quand vous remontez sur le causse, quatre lieues au nord, vous découvrez un tout autre paysage. Si vous glissez vers l’ouest, si vous allez « par chez moi », dans le Carladez, à une demi-heure d’ici, vous parcourez des paysages qui n’ont rien à voir avec ceux de l’Aubrac, dont ils ne sont pourtant séparés que par la Truyère, mais dont le relief est beaucoup plus accentué. Les vents qui les parcourent ont donné aux toits de lauzes des formes d’une particulière beauté.
 
J’ajoute qu’il y a dans cette contrée une remarquable qualité d’accueil et un bel esprit d’entreprise. Le lieu où nous nous réunissons en témoigne. Nous sommes ici dans un ancien couvent, dans une ancienne école ménagère, restaurée et aménagée par trois religieuses Ursulines dont la volonté et la détermination admirables ont réussi à faire un lieu hospitalier et ouvert, où beaucoup d’entre vous logent. C’est d’ailleurs un autre des atouts pour nos Rencontres que de pouvoir les réaliser dans un aussi plaisant et paisible cadre, et dans des conditions financières accessibles à chacun. Au cours de ces Rencontres, nous tiendrons trois débats. Le premier tournera autour du Fer servadou ou Mansois, notre cépage « modeste », celui du vin de Marcillac, qui a connu une évolution très remarquable. Le deuxième portera sur la question du degré. Après les échanges de ces deux tables rondes, rien ne sera plus nécessaire et plus approprié qu’un repas vigneron. Il sera agrémenté par un récital (le mot est un peu solennel) de Gérard Morel, auteur, compositeur, interprète, comédien, chanteur... et buveur de haute volée. Il est rangé parmi les « chanteurs à texte ». Évidemment, les autres aussi ont des textes, mais, tandis que pour eux cela constitue un problème, pour Gérard Morel, c’est un atout. Il chante ses propres chansons. Il a préparé un petit florilège de chansons dont beaucoup concernent notre sujet. Vous m’en direz des nouvelles. Notre troisième débat, qui aura lieu dimanche matin, tournera autour de la question  « Comment faire connaître les vins dont les vignerons et les cépages nous ont rassemblés pour ces premières Rencontres ? ».
Le ciel nous tienne en joie.